Le « Lion Impatient » de mettre en pièces sa proie, la Syrie
Mondialisation.ca, 18 juin 2013
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Quand
le président Napolitano rencontra l’an dernier en Jordanie S.M Le Roi
Abdallah II, il lui exprima « la haute considération avec laquelle
l’Italie voit la volonté de paix et la ligne de modération poursuivie
depuis toujours par la dynastie hachémite ». C’est dans cet esprit, à
coup sûr, que l’Italie participe en Jordanie à la manoeuvre « Eager
Lion » (lion impatient) sous commandement étasunien, en cours du 9 au 20
juin. Y participent 19 pays, unis par l’ « objectif commun de renforcer
la sécurité et stabilité régionale », menacées, ils n’en ont aucun
doute, par la Syrie d’Assad qui utilise des armes chimiques pour écraser
la rébellion. Les « preuves » ont été fournies par la Cia, la même qui,
il y a dix ans, fournît la documentation photographique, montrée par
Colin Powell au Conseil de sécurité, sur la possession par l’Irak de 500
tonnes d’armes chimiques et biologiques et de laboratoires mobiles pour
la guerre biologique. On a découvert ensuite, comme a reconnu Powell
lui-même, que de telles armes n’existaient pas et que les laboratoires
mobiles étaient en réalité des générateurs de gaz pour des ballons
aérostatiques à usage météorologique. Mais désormais les jeux étaient
faits : les « preuves » de la Cia avaient servi à justifier la guerre
contre l’Irak. Peu importe donc si, une fois la guerre gagnée contre la
Syrie, on découvrait que ce sont les « rebelles » qui ont utilisé des
armes chimiques, comme a déclaré Carla Del Ponte de la Commission Onu
sur les crimes de guerre.
D’après
le jugement sans appel de Washington, la Syrie a franchi la « ligne
rouge » et le président Obama, à contrecoeur, a décidé de fournir des
armes aux « rebelles ». En dissimulant le fait, émergé de l’enquête du New York Times
(26 mars), que depuis janvier 2012 la Cia fournit des armes aux
« rebelles », en les faisant arriver par un pont aérien en Turquie et
Jordanie et en entraînant là les forces infiltrées en Syrie. C’est sur
ce fond que se déroule « Eager lion », une véritable manoeuvre de guerre
avec forces aériennes, aérotransportées, navales, amphibies et
terrestres, comprenant plus de 8mille hommes. Parmi lesquels des
militaires italiens, y inclus probablement le 185ème régiment Reconnaissance Acquisition Objectifs de la Brigade Folgore
(foudre). Aux côtés de militaires d’une foi démocratique
exceptionnelle, tels que saoudiens, yéménites, qataris et autres. Tous
aux ordres du Commandement central des Etats-Unis, dont l’ « aire de
responsabilité » embrasse Moyen-Orient et Asie Centrale (y compris
Syrie, Irak, Iran et Afghanistan), plus l’Egypte.
Ce
qu’est l’objectif réel de « Eager Lion » est démontré par le fait que,
la manoeuvre finie, le Pentagone laissera en Jordanie les chasseurs F-16
et les missiles terre-air Patriot. Ceux-ci viendront s’ajouter aux
Patriot étasuniens, allemands et hollandais déjà déployés en Turquie à
la frontière avec la Syrie. Tout est prêt pour une « no-fly
zone limitée », étendue à 40 Kms à l’intérieur de la Syrie, qui –selon
des fonctionnaires USA interviewés par le Wall Street Journal-
servira à « protéger les camps d’entraînement des rebelles et la
fourniture des armes ». La no-fly zone sera imposée par les chasseurs
étasuniens qui, décollant de Jordanie et des porte-avions, pourront
détruire avec leurs missiles les avions et les défenses anti-aériennes
de la Syrie sans survoler son territoire. La no-fly zone, donc, « ne
requerra pas une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu ». Le coût
prévu est de « seulement » 50 millions de dollars (37 millions d’euros)
par jour qui, assure Washington, seront payés aussi par les alliés. On
ne sait pas encore quel sera le pourcentage italien, mais le
gouvernement trouvera les sous, en pressurant les caisses publiques et
en faisant de nouvelles coupes dans les dépenses sociales.
Manlio Dinucci
Edition de mardi 18 juin de il manifesto
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
Apostille de la traductrice pour la version française :
Aucune information officielle (sites gouvernementaux) sur la participation de la France à « Eager Lion ». D’après le site « Infosdefense, le magazine des questions stratégiques et d’actualité » :
« [...] la Jordanie a annoncé aujourd’hui (9 juin, NdT) la tenue d’un exercice majeur rassemblant 19 pays dont la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, l’Arabie Saoudite ou encore le Qatar. On ignore la teneur de la participation française » (surlignages de la traductrice). « Au total 8000 militaires, dont 4500 américains et 3000 jordaniens [...] ».
Si l’on se fie aux informations d’Infosdéfense,
cela nous fait donc 500 militaires pour les 17 autres pays
participants. On peut toujours espérer que ce lion bien qu’impatient ne
sera pas trop coûteux pour nous (même avec les interprètes, pour 19
pays).
« Depuis plusieurs mois, les Forces Spéciales américaines conduisent des pénétrations en territoire syrien pour recueillir du renseignement. Aidés par des français et des britanniques, elles forment également les insurgés syriens au maniement des armes ».
Coût
de la participation française à cette « aide », et à l’opération « Eager
Lion » ? Chacun appréciera la précision et la retenue des informations
d’Infosdéfense.