La valise diplomatique
Quand l'Etat colombien espionne ses opposants
par Hernando Calvo Ospina
Depuis cinq ans, d'influents médias colombiens - entre autres la revue Semana - ont commencé à ébruiter ce que les organisations de défense des droits humains savaient déjà : les hauts responsables du Département administratif de Sécurité (DAS), service de renseignement politique qui dépend directement du président de la République, chargeaient des chefs paramilitaires d'assassiner les opposants. L'un de ces fonctionnaires, M. Rafael García, a reconnu que nombre d'opérations de « guerre sale » menées par le DAS ont été financées grâce à l'argent du trafic de cocaïne. Malgré leur gravité, ces informations, comme tant d'autres, sont restées sans suite dans la rubrique « justice nationale ».
En parallèle, on découvrait que l'ordre d'espionner illégalement des défenseurs des droits humains, des opposants politiques et des journalistes « étiquetés » de gauche partait du Palais présidentiel de Nariño. Ces personnes étant « censées collaborer » avec les « terroristes » de la guérilla, la mise en lumière de ces méthodes a été traitée comme une information banale. Les réactions ont commencé à changer lorsque les médias ont dévoilé que cet espionnage illégal touchait aussi des magistrats de la Cour suprême de justice et des dirigeants des partis traditionnels.
La tension est montée lorsque des fonctionnaires du DAS ont été mis en examen. Le chef suprême du DAS, c'est-à-dire le président Alvaro Uribe, a pris leur défense, proposant même de mettre sa main au feu tant il était convaincu de leur innocence. Peu de temps après, certains d'entre eux - dont l'ancien directeur général de l'institution, M. Jorge Noguera - ont été incarcérés. M. Uribe a alors affirmé que cela ne faisait que servir la « stratégie de déstabilisation » des « terroristes ». A force d'être répétées, ces phrases ont fait office de chantage menaçant (...)
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