Fabrication de preuves pour attaquer l’Iran?
Des espions israéliens en Iran déguisés en soldats iraniens
par Julie Lévesque
Le 28 mars 2012
Mondialisation.ca - 2012-03-27
Un reportage publié le 25 mars dans le Sunday Times indique qu’« Israël utilise une base permanente dans le Kurdistan irakien pour lancer des missions de renseignement transfrontalières afin de trouver des preuves tangibles que l’Iran fabrique une ogive nucléaire ». (Israeli spies scour Iran in nuclear hunt, The Sunday Times, 25 mars 2012.)
Des sources occidentales ont dit au Times
qu’Israël surveillait « la radioactivité et la magnitude de tests
d’explosifs [et que] des forces spéciales utilisaient des hélicoptères
Black Hawk pour transporter des commandos déguisés en membres de l’armée iranienne et utilisant des véhicules militaires
iraniens sur le terrain ». Les sources croient que les « Iraniens
tentent de cacher des preuves révélant des tests d’ogive afin de
préparer une possible visite de l’AIEA [Agence internationale de
l’énergie atomique] ». (Cité dans Report: Israeli soldiers scour Iran for nukes, Ynet, 25 mars 2012.)
Selon
cet article, le nombre de missions du renseignement israélien à la base
militaire de Parchin en Iran s’est accru dans les derniers mois. Durant
cette période, Téhéran négociait avec l’AIEA, qui avait demandé de
visiter Parchin. Selon le représentant permanent iranien de l’AIEA, Ali
Asghar Soltanieh, les deux parties s’étaient entendues au début de
février pour que la visite ait lieu en mars. (Gareth Porter, Details of Talks with IAEA Belie Charge Iran Refused Cooperation, IPS, 21 mars 2012.)
L’AIEA
a demandé de visiter Parchin à la fin janvier ainsi qu’à la fin
février, après avoir accepté une visite en mars. L’Agence a donc demandé
à voir le complexe militaire au moment même où Israël intensifiait ses
opérations secrètes dont le but présumé est de chercher une preuve,
un « pistolet fumant » (smoking gun).
Il
y a quelques années, on a suggéré qu’Israël était la source de faux
renseignements concernant le présumé programme nucléaire iranien, à
savoir un ordinateur portable volé. Le New York Times a publié
un reportage en 2005 sur ce qui devait représenter « la preuve la plus
solide » indiquant que l’Iran fabriquait des armes nucléaires :
Des
représentants du renseignement étasunien ont invité les chefs de
l’agence internationale de l’inspection atomique (sic) sur le toit d’un
gratte-ciel de Vienne dominant le Danube et ont révélé le contenu de ce
qu’ils ont présenté comme étant un ordinateur portable iranien volé.
Ils
ont déclaré que les documents représentaient la preuve la plus probante
que l’Iran, bien qu’il insiste sur le caractère pacifique de son
programme nucléaire, tentait de développer une ogive compacte adaptée à
son missile Shahab, lequel peut atteindre Israël et d’autre pays du
Moyen-Orient. (William J. Broad and David E. Sanger Relying on Computer, U.S. Seeks to Prove Iran's Nuclear Aims - New York Times, 13 novembre 2005.)
En 2010, une enquête journalistique a suggéré que ces documents étaient faux :
L’ogive
représentée dans les schémas avait la forme familière de « bonnet
d’âne » du missile nord-coréen No Dong original, acquis par l’Iran au
milieu des années 1990 […]
Les documents du portable illustraient la réingénierie du mauvais corps de rentrée […]
Il
se peut qu’il n’y ait jamais de preuves concluantes sur l’origine des
documents du portable, toutefois les preuves accumulées indiquent
qu’Israël en serait la source. Dès 1995, le chef de
la division de recherche et d’évaluation du renseignement militaire des
Forces de défense israéliennes, Yaakov Amidror, a tenté sans succès de
persuader ses homologues étasuniens que l’Iran prévoyait « se
nucléariser ». Selon des sources israéliennes citées par un service de
presse pro-israélien, à partir de 2003-2004, les rapports du Mossad sur
le programme nucléaire iranien étaient perçus par les hauts
représentants de la CIA comme une tentative de faire pression sur
l’administration Bush afin qu’elle envisage une action militaire contre
des sites nucléaires iraniens. (Gareth Porter, Exclusive Report: Evidence of Iran Nuclear Weapons Program May Be Fraudulent, Global Research, 18 novembre 2010.)
Le
fait que des agents du renseignement israélien étaient en mission
secrète à Parchin, déguisés en soldats iraniens et conduisant des
véhicules militaires iraniens au moment où l’AIEA faisait pression sur
Téhéran pour visiter ce lieu précis soulève de sérieuses questions. Le
but affiché de ces missions secrètes est la recherche de preuves
tangibles, d’un « pistolet fumant ». Les allégations de « pistolet
fumant » relatives aux armes de destruction massive en Irak on démontré
que de telles preuves peuvent être fabriquées et utilisées pour lancer des guerres soi-disant préemptives.
Julie Lévesque
Julie Lévesque